Jouir d’obéir - Témoignage d’une soumise
Je ne l’ai jamais vu. Je connais simplement son prénom. Il est beau et il est surtout secret, parce qu’elle préfère rester anonyme. La seule chose que je sais d’elle, c’est qu’elle pratique le BDSM depuis peu de temps, mais qu’elle a trouvé là une véritable voie d’épanouissement. Dans le jargon, c’est une soumise. Ça me plaît, parce que s’il y a une chose que j’ai bien comprise à propos du BDSM, c’est que celle qui a le pouvoir, c’est celle qu’on domine 😉.
Entrons donc dans le vif du sujet :
"Dans ma vie, le BDSM est un vaste terrain de jeu, qui me permet de laisser sortir la gamine, le petit chat, la sale merdeuse et la salope qui sommeillent en moi. N'ayons pas peur des mots, s'il y a bien une chose qui caractérise cet univers, c'est de faire fi des conventions et de s'affranchir de la morale. Je le fais comme un doigt d'honneur à mon éducation et sous le regard tantôt amusé, tantôt sadique mais toujours bienveillant de celui que j'appelle "Maître". Je mange parfois mon repas sans couvert, bois dans une gamelle, prends des coups de cravache, ou me promène nue sous mon manteau tard le soir et tenue en laisse... le tout dans le plus grand des calmes."

"Je mange parfois mon repas sans couvert, bois dans une gamelle, prends des coups de cravache, ou me promène nue sous mon manteau tard le soir et tenue en laisse."
Je ne suis pas folle, je suis juste soumise
"Les pratiquants du BDSM seraient-ils tous des grands tarés, ou bien des adultes noyés dans leurs traumas ? Certains probablement. La plupart, moi en tout cas, sont de grands enfants, qui veulent jouer à des jeux d'adultes, se prouver des choses, se challenger et sortir des sentiers battus pour vibrer un peu.
Mes premiers fantasmes remontent à l'enfance, malheureusement ma trouille légendaire m'a tenue à l'écart de ce monde - qui est désormais le mien - pendant trop longtemps, me privant ainsi de bon nombre d'orgasmes et de relations épanouissantes. Il a fallu creuser, dans les tréfonds d'internet, mais aussi au plus profond de moi (sans mauvais jeu de mots) pour comprendre ce qui m'animait là-dedans, et pour me défaire de ce préjugé qui me hantait : "je dois vraiment être cinglée" 💭.
Contrairement à tous les romans sur le sujet, aucun homme ne m'est tombé dessus, sorti de nulle part, offrant à la douce et naïve pucelle que j'étais une nouvelle vie de luxe et de débauche. Non, j'ai chassé le dominant toute seule, comme une grande, toute novice que j'étais (et que je suis encore d'ailleurs), parce que ça vibrait pour moi. C'est aussi seule que j'ai dû dépasser certaines interrogations philosophiques du type "peut-on être soumise et féministe à la fois ?" Et j'avoue que j'aurai mieux fait de me trouver plus tôt d'autres pratiquants à qui en parler. Ça m'aurait évité quelques nuits blanches et autres crises existentielles. Car oui, le rapport de soumission m'a appelé aussi fort que l’appel du paquet de bonbon en plein régime 👅 ! Une fois mis les pieds dedans, impossible de faire marche arrière, bien obligée de faire face à l'évidence : ça, c'est moi, j'ai besoin d'être soumise. Enfin la soumise de quelqu'un, hein, pas celle du peuple !"
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LE BDSM, plus que du c.., c'est du cérébral
Le consentement est une notion capitale dans l'univers du BDSM. L'échange et la communication sont primordiaux. Je commence même à penser qu'ils sont bien plus présents dans un rapport dominant-soumis que dans une sexualité plus classique. Ici, la porte ouverte sur les fantasmes les plus fous implique le respect, la confiance et aussi l'engagement.
Avec sa, son ou ses partenaires, on discute de ce qu'on est prêt à accepter ou non, tout de suite ou plus tard, des zones corporelles que l'on peut toucher, stimuler, pénétrer ou autres et de celles qui restent interdites, etc. Le BDSM flirte avec les limites de chacun, mais le consentement à tout moment reste essentiel pour un plaisir partagé.
C'est pour ça qu'il existe un safeword (ou mot de sécurité) à prononcer quand on ne se sent plus à l'aise, plus en sécurité. À défaut de safeword (imprononçable si on est bâillonné par exemple...😷), certains gestes ou postures servent de signaux d'alerte.
"Je dois dire que comme dans toute relation, l’exigence est de mise, mais peut être même plus que dans une relation classique. On a beau remplir une check-list de pratiques auxquelles on consent, voire signer un contrat pour cadrer la relation, on ne confie pas à n’importe quel nigaud le loisir de nous cravacher les fesses, de nous attacher au lit, ou de décider combien de séances de sport on va faire par semaine. ☝️
Car le BDSM, ce n’est pas forcément que du cul, et dans ma relation D/S (Dominant/soumis), c’est surtout un lien très fort, un dévouement de l’un à l’autre, réciproque bien que non égalitaire, et surtout une confiance immense qui se doit de grandir chaque jour pour s’explorer davantage."
Une rencontre... avec soi
"J’en apprends tellement sur moi au travers de ce rapport à Mon Autre, celui que j’appelle parfois Mon Roi.
J’ai par exemple compris récemment que j’étais ce qu’on appelle une Brat (une morveuse, une sale gosse en anglais), c’est-à-dire une soumise dont le plus grand plaisir est de désobéir pour chercher le rapport de force. Mais j’apprends aussi la discipline, chose qui de base se situe très loin de mon vocabulaire personnel et qui pourtant me permet d’affronter plus sereinement ma vie de trentenaire et ses responsabilités. J’apprends à m’analyser encore et encore, mes ressentis, mes émotions, et à les communiquer même quand je sais que ça ne va pas lui plaire, parce que c’est une des règles de base, commune à toute la sphère…
Finalement, ma vision du BDSM est très ludique, pas franchement protocolaire, mais cela ne m’empêche pas d’avoir un lien très profond à mon Dominant. Nous créons chaque jour une relation qui nous ressemble, que nous ne cessons d’ajuster pour qu’elle nous comble tous les deux. C’est un challenge, un réel investissement et beaucoup de dépassements de soi, mais c’est aussi beaucoup de tendresse et de complicité, un vrai pilier dans ma vie."

"[Je suis] une soumise dont le plus grand plaisir est de désobéir pour chercher le rapport de force."
Et si finalement le BDSM, ou à défaut, une sexualité épanouie, quelle qu'elle soit, c'était la meilleure façon d'aller à la conquête de soi-même ?
Place à l'expert : Le BDSM par Nathalie Giraud Desforges, sexothérapeute
Anonyme, il y a 2 ans